Race Across France par Julien Botas « J’ai traversé la France, soit 2 500Km, en 8 jours sur le vélo du Tour de France »

Race Across France par Julien Botas « J’ai traversé la France, soit 2 500Km, en 8 jours sur le vélo du Tour de France »

Il l’a fait, il a terminé la Race Across France 2500 km en bike packing. Notre ambassadeur Julien Botas ne s’est pas simplement contenté de venir à bout des 2500 km qui séparent Mandelieu-la-Napoule du Touquet-Paris-Plage, mais il a achevé le périple sur un Émonda SLR9, vélo de coursier par excellence puisque c’est ce même bolide qui équipe notre équipe World Tour Trek-Segafredo.

Avant de vous livrer l’interview suite à cette « sortie longue » qui a pu effrayer ses followers Strava, voici une brève présentation de la « RAF 2500 solo » . C’est LA course d’ultra-distance en France, se voulant être la petite sœur de son homologue américaine, la Race Across France compte 2500km pour 32 000 mètres de dénivelé positif, ajoutez à cela une obligation, pour la version « autonomie complète », de n’avoir aucun recours à une aide extérieure, ni la possibilité de rouler avec une autre personne (interdiction donc de prendre l’aspiration etc.).

Le décor est planté, discutons avec Julien :

 

Trek : « Salut Julien ! Tout d’abord un grand bravo pour l’achèvement de cette Race Across France comme beaucoup, on a du mal à réaliser ! La première question qui nous vient : où as-tu dormi ?

Julien : « Hello les amis ! Merci beaucoup, très heureux d’avoir pu terminer cette RAF, non seulement en un seul morceau mais en plus avec le sourire ! Pour répondre à votre question, j’ai opté pour un couchage en dur, à savoir trouver des gîtes, chambres d’hôte ou petits hôtels. En fait je me suis inscrit très tardivement sur cette course, moins de deux mois avant le départ et je n’avais jamais utilisé de couchages extérieurs en bike packing. Du coup pour la RAF j’ai préféré garder une stratégie que je connaissais à savoir regarder sur mon téléphone 3/4 heures avant d’achever ma journée, pour trouver les potentiels hébergements.

Trek : Et tu n’as jamais rencontré de problème ? Tu avais pu planifier tous tes arrêts avant ta course ?

Julien : Alors en fait j’ai rencontré un souci dès le premier jour ! Je n’avais rien planifié parce que c’est juste impossible de réellement savoir où l’on va s’arrêter sur une course d’ultra, il y a trop d’imprévus, de changements de plans. J’avais juste référencé quelques endroits en France où il valait mieux que je ne m’arrête pas, faute d’hébergements. Mais je n’ai pas trouvé d’hébergement dès le premier jour (pour info les concurrents partent la veille au soir, les obligeant à passer une nuit sur le vélo). J’ai eu la chance de tomber sur un concurrent qui n’était pas au mieux de sa forme après plus de 360 kilomètres et quelques milliers de mètres de D+, on a un peu discuté et il m’a proposé de demander à des amis de ses parents s’ils pouvaient m’accueillir le soir, chose qu’ils ont accepté avec plaisir. Franchement ç’a été salutaire car je suis arrivé après 470km, je n’avais pas dormi depuis 40 heures et ils m’ont vraiment choyé !

Trek : Mais cela ne te stressait pas trop de ne pas savoir où dormir le soir ?

Julien : Vous savez je suis plutôt de nature optimiste, je me suis dit que même si je n’avais pas d’hébergement, il y aurait une bonne âme pour m’accueillir quelque part. Avec le recul je suis plutôt content de ma stratégie parce que je ne me suis pas lesté de matériel supplémentaire, mais je vous avoue que je suis content d’avoir toujours trouvé un logement !

Trek : Parle-nous justement de ton matériel, avec quoi es-tu parti ?

Julien : Alors je ne vais pas vous faire le détail exact car j’ai fait une vidéo sur YouTube détaillant justement tout cela. Mais brièvement j’avais 3 sacoches : une de cadre, une de selle et une autre de cintre (petite sacoche sur le dessus du tube horizontal). J’avais un peu de nourriture, quelques barres etc. que je consommais uniquement en cas de coup dur. Pour le reste de l’alimentation je privilégiais ce que je trouvais sur le parcours, majoritairement en boulangeries, car c’était plus appétant et surtout ça me permettait de garder une petite réserve de nourriture « au cas où ». Ensuite j’avais des vêtements d’appoint comme une veste de pluie, des gants… J’avais une frontale, deux lampes arrière de rechange (Bontrager Flare RT), une batterie externe pour recharger le GPS ou la lampe avant en cas de besoin (Bontrager Ion Pro). Ensuite j’avais des essentiels de survie comme une couverture de survie, un couteau suisse etc. Et j’avais deux Go Pro, une fixée sur l’avant de mon vélo et l’autre dans la sacoche de cintre, d’où la petite vidéo « inside » de la course dans cet article !

Trek : Effectivement ça fait relativement peu de chose pour 2500 km. As-tu oublié des éléments qui auraient pu te manquer sur la course ?

Julien : La seule erreur que j’ai faite par rapport au matériel a été de ne pas prendre ce que j’avais prévu en terme de vêtements à la base vie numéro 2 (les concurrents doivent passer par deux bases vies sur la course où un sac personnel leur est réservé, une base vie avant les Alpes et une autre après). De ce fait j’ai eu hyper froid lorsque j’ai été surpris par un orage en haut de l’Iseran à 2 770m d’altitude. Mais sinon j’avais plutôt bien fait mon cartable !

Trek : Parle-nous un peu de ton vélo, ça doit être physique de parcourir autant de kilomètres sur un vélo si racé.

Julien : En fait pas du tout, je crois même que je n’ai jamais été aussi bien sur vélo. L’Emonda SLR9, que j’ai utilisé sur la course, était monté avec des roues Bontrager RSL 37 et une section de pneus de 28 pouces en tubeless. Franchement, c’était d’un confort inouï ! Le vélo en lui-même est très réactif, joueur, nerveux, tu appuies sur les pédales et hop ! Ça part au quart de tour. Mais j’ai été bluffé par la filtration des aspérités de la route, le tube vertical se déforme légèrement pour gommer les petits trous et autres désagréments que l’on peut rencontrer, les roues montées d’une section de 28 pouces étaient juste parfaites. J’avais également baissé la hauteur de selle et monté le cockpit au maximum pour ne pas trop tirer sur le bas du dos.

Trek : A ce sujet ton cockpit a été revisité pour l’occasion, nous en avons fait un article.

Julien : Oui oui, vous m’avez monté un cockpit de Madone SLR afin de pouvoir y ajouter les prolongateurs du Madone SLR Speed. C’était la cerise sur le gâteau !

Trek : Content de te savoir satisfait du montage. On ne voit pas beaucoup de moments « difficiles » sur ta vidéo, peux-tu nous expliquer pourquoi ?

Julien : En fait c’est parce qu’il n’y en as pas eu beaucoup. Je dirais qu’il y en a eu 4, le premier jour dans le Ventoux où je prends un tir car je n’ai pas dormi depuis plus de 30 heures et qu’on monte en plein soleil par 36°. Ensuite le troisième jour où je n’avais quasiment pas dormi dû à une indigestion (ma première journée dans les Alpes avec 210 km et plus de 6800m de D+). Il y a eu, en troisième, la descente de l’Iseran où je vois la température passer de 12° à 5°, avec de la grêle, j’étais frigorifié. Et enfin la quatrième où j’enchaîne deux jours pour un total de 640 km avec un vent de face constant, dont certaines portions sur des grandes départementales, frôlé par les camions. Du coup je n’ai malheureusement pas pu tout filmer, mais promis, j’ai toujours gardé le moral et le sourire !

Trek : A quoi pensais-tu pendant tout ce temps ? Ca ne t’a pas paru interminable ?

Julien : J’ai pensé à plein de choses, je pensais à ma famille, à ma copine, à mes amis. Je pensais à ceux qui me suivaient, je recevais des messages etc. Franchement j’ai eu un sacré soutien, c’était tellement cool de voir tous ces gens me suivre, m’encourager, voyager avec moi. Et puis je chantais, j’ai beaucoup chanté d’ailleurs ! Je faisais des mash-up en mêlant plusieurs chansons, je me racontais des histoires, je contemplais le paysage etc. J’ai pris ce temps pour réfléchir à plein de choses et mesurer à quel point la vie est belle et qu’il faut en profiter.

Trek : On aurait presque envie de se lancer… Quels conseils aurais-tu à nous prodiguer si tel était le cas ?

Julien : Tout d’abord de bien connaître son matériel, son vélo, ses vêtements, ses sacoches. Savoir exactement ce dont vous avez besoin, ce qui est essentiel et laisser de côté « ce qui peut servir ». Ensuite de borner en amont, faire pas mal de volume, essayer de rouler la nuit, essayer de dormir peu, enchaîner plusieurs grosses journées de 200 km par exemple. Il faut également ne pas stresser, il y aura toujours des imprévus, toujours des galères, mais il y a aussi toujours des solutions. Et puis connaître l’alimentation qui vous correspond, faire plein d’essais et ne garder que ce qui fonctionne sur vous.

Trek : Merci Julien pour cette interview, ces images et d’avoir autant partagé cette aventure avec nous. On va te laisser sur cette dernière question : si tu croisais Elisa Balsamo (actuelle championne du monde) et que tu devais l’intercepter pour lui parler de ta RAF, avec quelle phrase le ferais-tu ?

Julien : « Eh Elisa ! J’ai traversé la France en 8 jours sur le même vélo que toi ! » Merci beaucoup les amis et à bientôt pour de nouvelles aventures !

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